Dans le cadre d'un contrat de bail d'habitation, il est possible de prévoir qu'en plus du loyer le locataire s'acquittera mensuellement d'une somme au titre des charges. Les charges sont des dépenses réalisées par le bailleur au titre du logement dont il va pouvoir demander le remboursement au locataire. On utilise ainsi l'expression charges récupérables.
Sauf exception, le montant des charges fixé dans le contrat de bail va constituer une provision. Il s'agira donc d'une avance réalisée par le locataire sur les charges. Annuellement, le bailleur devra ainsi calculer le montant réel des charges récupérables et procéder ainsi à ce qu'on appelle une régularisation des charges locatives.
Comment fixer le montant des charges dans le contrat de bail ?
Le montant des charges fixé dans le contrat de bail pourra constituer soit une provision (devant donner lieu à une régularisation annuelle) soit un forfait de charges (ne devant pas donner lieu à régularisation annuelle).
Si la tentation de fixer un forfait de charges peut être grande pour le bailleur afin d'éviter d'avoir à réaliser une régularisation annuelle, cette possibilité ne lui sera pas toujours ouverte. Par ailleurs, il s'exposera au risque de fixer un forfait insuffisant et de conserver en conséquence une partie des dépenses à sa charge.
1) Le principe: la fixation d'une provision sur charges
En principe, le montant des charges indiqué dans le contrat de bail est une provision donnant lieu à régularisation annuelle conformément à l'article 23 de la loi du 6 juillet 1989.
L'obligation de régler les charges est une obligation légale (article 7 a) de la loi du 6 juillet 1989). Si le bail ne prévoit pas de provision sur charges, le bailleur pourra demander le remboursement des charges exposées par lui et récupérables auprès du locataire au fur et à mesure de leur règlement ou annuellement par exemple.
2) L'exception: le forfait de charges
Il est possible de prévoir un forfait de charges dans deux cas:
- en cas de contrat de colocation conformément aux dispositions de l'article 8-1 de la loi du 6 juillet 1989
et/ou
- en cas de contrat portant sur un logement meublé (article 25-10 de la loi du 6 juillet 1989)
Par ailleurs, les charges seront obligatoirement réglées selon un forfait en cas de contrat de bail dit "mobilité" (article 25-18 de la loi du 6 juillet 1989).
Attention, lors de la fixation du forfait de charges: son montant ne doit pas être " manifestement disproportionné au regard des charges dont le locataire ou, le cas échéant, le précédent locataire se serait acquitté". Le forfait ne doit ainsi pas être fixé aléatoirement. Il est recommandé d'établir une estimation des charges récupérables et de fixer le forfait en fonction du résultat obtenu.
Ce forfait ne donnera pas lieu à régularisation. Cela signifie qu'il n'y aura pas de calcul annuel des charges effectivement exposés. En revanche, il pourra donner lieu à une révision (comme le loyer) en fonction de l'évolution de l'IRL (sous réserve que le contrat de bail le prévoit).
Quelles sont les charges récupérables ?
Le bailleur pourra demander le remboursement par le locataire uniquement des dépenses visées à l'article 23 de la loi du 6 juillet 1989. Ce texte vise:
- 1° Les services rendus liés à l'usage des différents éléments de la chose louée ;
- 2° Les dépenses d'entretien courant et des menues réparations sur les éléments d'usage commun de la chose louée.
- 3° Les impositions qui correspondent à des services dont le locataire profite directement.
En pratique, les charges récupérables auprès du locataire seront principalement constituées des charges de copropriété récupérables et de la taxe sur les ordures ménagères.
1) Les charges de copropriété
Toutes les charges de copropriété ne peuvent pas être récupérées auprès du locataire.
Pour déterminer le montant des charges récupérables, il faudra se référer au décompte annuel établi par le syndic qui distingue d'une part la "quote-part" et le "locatif".

2) La taxe sur les ordures ménagères
Le montant de la taxe sur les ordures ménagères est précisé sur votre avis de taxe foncière.

Comment procéder à la régularisation des charges locatives ?
La régularisation des charges locatives consiste à réaliser la différence entre d'une part le montant des provision appelées et d'autre part le montant réel des charges réglées par le bailleur au titre du logement.
En fonction du résultat de l'opération, soit il sera demandé au locataire de régler un complément de charges soit il sera restitué au locataire une partie des provisions versées.
Un mois avant la régularisation, le bailleur devra communiquer au locataire:
- le décompte par nature de charges
- dans les immeubles collectifs, le mode de répartition entre les locataires
- le cas échéant, une note d'information sur les modalités de calcul des charges de chauffage et de production d'eau chaude sanitaire collectifs et sur la consommation individuelle de chaleur et d'eau chaude sanitaire du logement.
Durant six mois à compter de l'envoi de ce décompte, les pièces justificatives sont tenues, dans des conditions normales, à la disposition des locataires. Depuis le 1er septembre 2015, le bailleur doit également transmettre, à la demande du locataire, le récapitulatif des charges du logement par voie dématérialisée ou par voie postale.
En pratique, il est recommandé d'adresser au locataire le décompte des charges locatives avec les justificatifs ayant permis d'établir ce décompte.
Quand procéder à la régularisation des charges ?
L'article 23 de la loi du 6 juillet 1989 précise que la régularisation doit être annuelle. En pratique, le bailleur ne pourra procéder à la régularisation qu'après avoir reçu les justificatifs des charges exposées pour l'exercice concerné (en particulier décompte des charges de copropriété et taxe foncière). Ainsi, la régularisation ne pourra généralement pas intervenir avant le mois de septembre pour les provisions versées l'année précédente.
La régularisation devra en principe intervenir avant la fin de l'année au titre des provisions versées l'année précédente. (Ex. pour les provisions versées en 2022, la régularisation devra intervenir avant le 31 décembre 2023). A défaut, le locataire pourra demander à régler le montant de la régularisation en 12 mensualités.
Aucune sanction n'est prévue lorsque le bailleur ne procède pas régulièrement aux régularisation de charges des copropriété. Mais la régularisation tardive des charges de copropriété par le bailleur pourra exceptionnellement constituer une faute et donner lieu à l'allocation de dommages et intérêts au profit du locataire (Voir par exemple: Cour de cassation, civile, Chambre civile 3, 21 mars 2012, 11-14.174).
Au maximum, le bailleur disposera d'un délai de 3 ans à compter de la date à laquelle il a disposé de tous les justificatifs pour procéder à la régularisations de charges, pour demander en justice le règlement du complément de charges (article 7-1 de la loi du 6 juillet 1989).
Enfin, si le bailleur ne justifie pas des charges qu'il a exposées, le locataire sera fondé à solliciter le remboursement des provisions versées (C.Cass. 3ème civ. 8 déc. 2010, n°09-71.124 ; C.Cass. 3ème civ. 9 juin 2015, n°14-15.444). Le locataire disposera pour agir d'un délai de 3 ans à compter de l'établissement par le bailleur du décompte de régularisation de charges (Cour de cassation, 3e chambre civile, 9 Novembre 2017 – n° 16-22.445) dans la limite de 20 ans à compter du règlement des provisions pour charges (article 2232 du code civil). Ainsi le bailleur qui omet d'adresser le décompte de régularisation de charges locative, s'expose pendant longtemps au recours de son locataire.